Le 18
juillet, les partisans du maintien des colonies juives dans la bande de
Gaza ont commencé à se rassembler à
Nétivot, dans le sud d’Israël, à
une dizaine de kilomètres du point de passage de Kissoufim.
C’est en ce
lieu qu’ils avaient décidé de tenter de
pénétrer dans le territoire,
malgré l’interdiction du gouvernement, dans l’intention
affirmée
d’obliger Ariel Sharon à renoncer au plan de retrait. À
partir de la
mi-août, en effet, les vingt-et-une colonies juives de la bande
de Gaza
et quatre des cent vingt colonies de Cisjordanie doivent être
évacuées,
selon le «plan de désengagement» défendu par
le Premier ministre
israélien. L’évacuation concernerait 7 à 8000
colons du territoire de
Gaza et 500 en Cisjordanie.
Face à une extrême droite et
aux religieux décidés à résister à
cette
évacuation et à en faire une arme politique
vis-à-vis du gouvernement,
celui-ci, derrière Sharon, dit qu’il veut respecter la
«feuille de
route», ce programme rédigé en 2004 par les
États-Unis, l’Union
européenne, la Russie et l’ONU et censé conduire à
la stabilisation de
la situation en Israël et dans les Territoires occupés,
avec, en ligne
d’horizon, la création d’un État palestinien. Une partie
du
gouvernement, trois ministres dont Benjamin Netanyahu, membres de
l’aile dite «dure» du Likoud, le parti de Sharon, avaient
en effet, à
la faveur d’une sorte de jeu de rôles, proposé de reporter
d’au moins
trois mois le retrait de la bande de Gaza. Mais Sharon avait tenu bon,
dans une attitude d’autant plus théâtrale que huit ans
auparavant, face
à un Netanyahu alors Premier ministre, c’était lui qui
s’était opposé à
un accord avec l’Autorité palestinienne sur le retrait de la
ville
d’Hebron, en Cisjordanie. Les forces militaires à mettre en
œuvre pour
maintenir la colonisation à Gaza, de plus en plus importantes,
devenaient un argument supplémentaire dans la décision du
gouvernement.
Mais, pendant que les colons les plus
extrémistes et leur principale
organisation, le Conseil des implantations juives, le Yesha, arborent
la couleur orange censée symboliser leur opposition à
«l’abandon» de ce
territoire, le gouvernement de Sharon se décide à
continuer sa
politique de dépossession des Palestiniens, menée depuis
des décennies,
et de colonisation en Cisjordanie, notamment dans la plus importante
des implantations, celle de Maale Adounim. Celle-ci compte
déjà 28000
habitants dont l’installation en Cisjordanie est une négation
criante
de toute volonté sérieuse d’aller vers la constitution
d’un État
palestinien un tant soit peu viable. Et qui plus est, des milliers de
nouveaux logements sont programmés à Maale Adounim et les
expropriations de terres appartenant à des Palestiniens, et pour
les
besoins de la cause baptisées «terres
d’État», n’ont pas cessé. Il
suffit d’ailleurs de rappeler la déclaration provocante, en
octobre
dernier, de Dov Weissglass, conseiller et bras droit de Sharon, qui
présentait le plan de désengagement comme «un
flacon de chloroforme
[...], la dose suffisante pour qu’aucun processus politique ne soit
engagé avec les Palestiniens».
Comme témoignage des intentions du
Premier ministre, plus d’un tiers de
la «barrière de sécurité», le mur de
600 kilomètres censé protéger
Israël d’éventuels attentats, est déjà
construit et Sharon, qui en
avait promis l’achèvement pour octobre 2005, a ordonné
que les travaux
soient accélérés, «peu importe le
budget». Cette clôture qui doit
«envelopper» Jérusalem-Est constitue en
elle-même une annexion
partielle de la Cisjordanie et, aux dires mêmes du Premier
ministre, a
pour but de «consolider les intérêts politiques
d’Israël».
Ce mur de «l’apartheid»
représente de manière abrupte la manière dont
le gouvernement Sharon, et derrière lui les États-Unis,
entendent
parvenir à une solution du conflit israélo-palestinien:
imposer aux
Palestiniens à un territoire morcelé et
contrôlé de toute part par
Israël et parallèlement imposer à la population
israélienne une
situation de guerre permanente qui pèse lourdement, même
en dehors des
colonies.
Viviane LAFONT |