LE HAMAS s'apprête à dévoiler la composition d'un gouvernement dont les postes clés seront attribués aux islamistes radicaux, qui ont remporté les élections législatives palestiniennes du 25 janvier. Confronté au refus du Fatah et des autres partis politiques modérés de participer au cabinet, le Mouvement de la résistance islamique a décidé d'assumer l'essentiel des responsabilités et de distribuer plusieurs portefeuilles à des technocrates et des indépendants. La formation d'un tel gouvernement ouvrirait la voie à une suspension de l'aide financière internationale directe à une Autorité palestinienne menacée de banqueroute. Le mouvement islamiste doit mettre, ce samedi, la dernière main à sa liste de ministres avant de la soumettre au président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Le gouvernement devrait être soumis à l'approbation du Conseil législatif palestinien (CLP, Parlement) ce lundi. Le porte-parole du groupe parlementaire du Hamas, Salah al-Bardawil, affirme que ce gouvernement comptera «des technocrates, des indépendants et un chrétien». Les ministères clés, dont les Affaires étrangères, l'Intérieur, les Finances et l'Education, devraient toutefois être attribués à des membres du Hamas. Seulement un tiers des membres du gouvernement devraient être issus du Parlement. Mahmoud Zahar, l'un des principaux dirigeants du Hamas dans la bande de Gaza, devrait se voir confier les rênes de la diplomatie palestinienne. Ce chirurgien parlant parfaitement l'anglais, qui incarne la tendance radicale du mouvement, a été victime de plusieurs tentatives d'assassinat ciblé israéliennes. Saïd Siam, un autre dirigeant du Hamas à Gaza, devrait être nommé au ministère de l'Intérieur. Il devrait ainsi prendre le contrôle des trois principales branches des forces de sécurité palestiniennes. Le Fatah de Mahmoud Abbas a pris, jeudi soir, la décision de ne pas participer à un gouvernement d'union nationale. Le Fatah et les autres partis modérés ont jugé insuffisants les changements proposés par le Hamas. Ce dernier a conditionné les négociations avec Israël à un retrait complet de l'Etat hébreu derrière la ligne de 1967. Le Fatah exigeait du Hamas qu'il reconnaisse les accords de paix intérimaires conclus avec Israël et le principe de négociations avec l'Etat hébreu. Il voulait aussi que le gouvernement adhère aux principes édictés par la charte de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), impliquant une reconnaissance implicite d'Israël. «Toute
décision du Fatah de ne pas participer au gouvernement irait
à l'encontre de ce
que nous souhaitons», a dit hier le premier
ministre, Ismaïl
Haniyeh. De son côté, le chef du bureau politique du
Hamas, Khaled Mechaal, a
confirmé que le Hamas allait poursuivre sa lutte contre
Israël. «Nous et les
sionistes avons rendez-vous avec le destin, a-t-il dit. S'ils
veulent un
combat, nous y sommes prêts. S'ils veulent une guerre, nous
sommes les fils de
la guerre. S'ils veulent la lutte, nous la mènerons jusqu'au
bout.» Isolement international Le
refus du Fatah devrait aboutir à un isolement du gouvernement,
prôné par Israël
et les Etats-Unis. Israël milite auprès de la
communauté internationale pour
une suspension totale de l'aide financière directe à
l'Autorité, même si cela
doit entraîner son effondrement. De son côté,
l'Union européenne cherche à
maintenir le flux de son aide à une population palestinienne
déjà très éprouvée
par l'intifada, sans avoir l'air de financer le Hamas. En 2005,
l'Autorité
avait reçu 1,3 milliard d'euros d'aide internationale. Sans
cette manne
financière, elle sera incapable de payer les salaires des
fonctionnaires et
risque à la banqueroute. Le Figaro, 18 mars 2006
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