La commission électorale a
confirmé, jeudi matin 26 janvier, que "le Hamas a devancé le Fatah" sans
toutefois préciser les scores réalisés par ces
formations. On ignore
donc si la mouvement islamique a obtenu la majorité absolue.
Ahmed
Qoreï, le premier ministre palestinien, a immédiatement
présenté sa
démission et a appelé le Hamas à former le
prochain gouvernement.
Ismaïl Haniyeh, le chef de file de la liste "nationale" du
Mouvement de
la résistance islamique (Hamas), avait assuré dès
l'aube que son
mouvement l'avait remporté.
Selon des responsables islamistes, le Hamas détiendrait entre 70 et 75 des 132 sièges en jeu. La Commission électorale palestinienne devait confirmer, jeudi en fin de journée, les résultats définitifs. La victoire des islamistes, qui devrait être confirmée en fin de journée, constitue un bouleversement politique sans précédent pour les Palestiniens et marque la fin du règne du Fatah, un peu plus d'un an après la disparition de son fondateur, Yasser Arafat, le 11 novembre 2005. La poussée incontestable du Hamas qui avait boycotté les premières élections législatives organisées en 1996 du fait de son opposition aux accords d'Oslo peut s'expliquer par plusieurs facteurs. La part du vote sanction, le rejet des pratiques de l'Autorité a sans doute joué pour une très large part. Ce phénomène déjà observé lors des élections municipales partielles organisées en Cisjordanie et à Gaza de décembre 2004 à décembre 2005 n'a été que très peu atténué par la dimension "nationale" des élections législatives. Lesté d'un bilan jugé catastrophique en terme de corruption et de désordres internes, le Fatah, identifié à l'Autorité depuis la création de cette dernière par les accords d'Oslo n'a pas été capable de convaincre les électeurs qu'il était prêt au changement et à la réforme, les deux termes justement choisis par le Hamas comme slogan de la campagne. Comme lors des élections municipales, la mécanique bien huilée des islamistes a également fait la preuve de sa supériorité. Le Hamas s'est mis en ordre de bataille sans accrocs une fois prise la décision de participer aux élections. Incapable en fait de surmonter la mort de Yasser Arafat, tiraillé entre les caciques accrochés à leurs postes et des cadres impatients d'exercer les responsabilités, Le Fatah a traversé au contraire une crise sévère pour la composition de sa liste "nationale" qui a manifestement laissé des traces que n'a pas effacé le charisme de sa tête de liste "nationale", Marouan Barghouti détenu en Israël où il purge plusieurs peines de prison à vie pour sa participation à l'Intifada. Au niveau des districts, en dépit des pressions exercées au cours des dernières semaines pour obtenir le retrait de candidatures "indépendantes" le Fatah s'est également souvent présenté divisé face à un seul candidat islamiste, généralement très bien implanté. Les admonestations et les menaces voilées de l'Union européenne, d'Israël et des Etats-Unis contre un rôle trop important du Hamas semblent avoir également joué au profit de ce dernier tant il paraissait contradictoire aux Palestiniens d'accepter la participation des islamistes aux élections au nom des principes démocratiques mais de refuser dans le même mouvement qu'ils exercent par la suite des responsabilités proportionnelles à leurs résultats. La possibilité exprimée par les principaux responsables politiques israéliens, toutes tendances confondues, de recourir à une politique unilatérale sur le modèle du retrait de Gaza en cas de blocage d'un éventuel processus de paix avec l'Autorité palestinienne a également desservi le Fatah au profit du Hamas qui a toujours considéré que les négociations avec Israël étaient vouées à l'échec. Privé de sa fonction d'interlocuteur avec les Israéliens, le Fatah devenait potentiellement inutile. Le retrait de Gaza avait d'ailleurs été majoritairement porté au crédit de la lutte armée — soutenue par des islamistes — par l'opinion publique palestinienne. La victoire revendiquée par le Hamas suscite trois questions. La première concerne les islamistes. Au sein du Hamas, les pragmatiques, favorables à la participation aux élections, ont des arguments à faire valoir aux radicaux. Sont-ils cependant prêts à gouverner, le veulent-ils, avec qui et sur quelle base ? Habitués aux décisions collégiales, les islamistes, qui ont multiplié les déclarations contradictoires, devraient prendre leur temps avant de répondre. La deuxième interrogation concerne le Fatah : est-il capable de passer du monopole du pouvoir au partage avec le Hamas ? Va-t-il accepter sa défaite pour engager les réformes internes trop longtemps retardée ? La dernière concerne le chef de l'Autorité palestinienne. Affaibli et en partie désavoué après ces élections Mahmoud Abbas souhaite-t-il rester au pouvoir ? Gilles Paris Le Monde 27.01.06
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