Samira Halayka, députée du Hamas :
"Il est dans la nature d'une femme de se sacrifier pour son mari"

Ici ou là, dans la presse, qu'elle soit bourgeoise ou même, ce qui est plus grave, militante, on peut lire que le Hamas ne serait pas tant que ça l'ennemi des femmes, que ce parti islamiste ayant des députées au Parlement National Palestinien, il pourrait même, pourquoi pas, améliorer le quotidien des femmes palestiniennes ! Comme si être femme signifiait forcément être féministe ! Il suffit de voir la France pour s'assurer que des femmes peuvent défendre de façon acharnée l'ordre moral réactionnaire (Christine Boutin par exemple est une femme !). Un article paru dans "La presse" dresse un portrait d'une de ces députées du Hamas : son message est clair, celui de la soumission de la femme à son mari !

Voir aussi :
Le programme du Hamas
Le gouvernement Hamas s'en prend à la danse du ventre
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hL'amour est fait de sacrifices, croit Samira Halayka. Et son sacrifice à elle, c'est de partager son mari avec une femme qui pourrait être sa fille.

À 42 ans, Samira Halayka vient d'être élue députée aux élections législatives palestiniennes. Son nom figurait sur la liste des candidats du Hamas. Et conformément aux préceptes prônés par ce groupe intégriste, elle ne sort pas sans son hidjab, refuse de serrer la main d'un homme et défend avec conviction le droit à la polygamie.

" Je suis une femme simple, élevée dans une famille très religieuse ", confie la nouvelle députée, rencontrée le mois dernier à Ramallah.

Originaire de Hébron, une ville de Cisjordanie où quelques centaines de colons juifs vivent au milieu de 100 000 Palestiniens, Samira Halayka détient un baccalauréat en droit islamique. Pendant plusieurs années, elle a travaillé dans un centre d'information où elle était chargée de recenser les confrontations entre la population palestinienne et les colons juifs.

À 21 ans, elle a épousé un voisin, Mohammed. Au fil des ans, le couple a eu six enfants. Puis, Mohammed a eu un coup de coeur pour une adolescente de 18 ans, qu'il a épousée et qui lui a rapidement donné un nouvel enfant.

Trois ans plus tard, les deux femmes partagent la même maison. Samira a ses appartements à l'étage, la jeune épouse au rez-de-chaussée. " Elle est comme une fille pour moi, et son fils, comme un frère pour mes enfants ", dit Samira, assurant que cette coexistence se passe dans la plus grande harmonie.

" L'islam permet aux hommes d'avoir jusqu'à quatre épouses et je ne pouvais pas empêcher mon mari de réaliser son désir ", dit Samira. De toute façon, selon elle, mieux vaut que l'homme soit lié officiellement à sa nouvelle femme, plutôt que de la jeter à la rue avec un enfant illégitime.

Pour Samira, il est naturel qu'un homme désire plus d'une femme à la fois et l'islam " constitue la meilleure manière de régler ce problème ".

Mais pour que la polygamie fonctionne bien, il y a des règles à respecter. " Le mari ne peut pas favoriser une épouse au détriment de l'autre. Il doit être juste. S'il dort une nuit avec l'une, il doit dormir l'autre nuit avec l'autre. Et il doit veiller équitablement à notre bien-être matériel. "

En ce moment, cette exigence d'équité ne pose pas trop de problèmes: le mari de Samira dort tout seul dans la cellule de la prison israélienne où il est incarcéré depuis plusieurs mois.

 Depuis sa prison, Mohammed peut suivre les séances du conseil législatif à la télévision et voir sa femme évoluer dans son nouveau milieu de travail. Samira est l'une des six femmes élues sous la bannière du Hamas aux législatives de janvier. Et l'une des 17 femmes dans une assemblée de 132 élus.

Même si elle est autorisée, la polygamie demeure peu populaire chez les Palestiniens, ne serait-ce que pour des raisons financières. À peine trois des nouveaux élus du Hamas ont plus d'une épouse.

Mais ce phénomène est aussi loin de faire l'unanimité. Le 8 mars dernier, des féministes palestiniennes avaient manifesté contre cette pratique encouragée par le Hamas.

Samira Halayka était scandalisée. " Ces féministes contestent l'une des doctrines fondamentales de l'islam. Elles ne se soucient pas de la protection de la deuxième femme ", dit-elle, ajoutant qu'il est dans la nature d'une femme de se sacrifier pour son mari.

Ne voudrait-elle pas elle-même multiplier les conjoints? " L'islam ne le permet pas, mais je peux divorcer et épouser un nouvel homme. "

Mais pour l'instant, son principal souci, c'est que son mari soit libéré. "Je serais honorée de pouvoir cirer ses chaussures ", clame-t-elle.

En fait, Samira aime tant son mari qu'elle est prête à le partager une fois de plus. " Si vous voulez l'épouser, ça me ferait plaisir de le partager avec vous. Regardez comme il est beau , dit-elle en brandissant le médaillon qu'elle porte accroché au cou.

 

La Presse, 13 avril 2006