À la
suite des États-Unis, l'Union européenne vient de
décider à son tour de
cesser le versement des aides directes, c'est-à-dire une partie
des
quelque 500 millions d'euros qu'elle verse annuellement à
l'Autorité
palestinienne. Quant aux 80 millions de dollars promis en compensation
par les États arabes, ils se sont résumés à
35millions, versés par
l'Algérie, déjà engloutis dans les dépenses
courantes du mois de
février. De son côté, Israël continue de
refuser de verser à l'Autorité
palestinienne les 40millions d'euros qui lui sont dus, correspondant
aux droits de douane perçus sur les produits qui transitent
nécessairement par le territoire israélien.
Ces aides n'étaient évidemment pas
versées par bonté d'âme par
les gouvernements occidentaux. Elles avaient pour but de limiter
l'étendue de la catastrophe subie par la population
palestinienne, du
fait de son enfermement à Gaza et en Cisjordanie,
conséquence directe
de la politique israélienne à son égard. En ce
sens, ces aides étaient
une sorte d'onguent dispensé par les puissances occidentales
pour faire
oublier leur complicité avec les gouvernants israéliens
et leur volonté
de ne pas s'opposer à ces derniers.
Parmi les 3,8millions d'habitants des villes et villages
palestiniens, 60% vivent au-dessous du seuil de pauvreté,
c'est-à-dire
avec moins de deux euros par jour. À présent, avec la
suspension des
aides internationales, c'est le traitement des 140000 fonctionnaires
palestiniens, non seulement des policiers mais aussi des enseignants,
des médecins, des infirmières, qui est directement
menacé. Il n'a
d'ailleurs pas été versé en mars; or ces salaires
font vivre environ un
tiers de la population. Par ailleurs, la fermeture partielle du point
de passage de Karni, unique porte commerciale avec Israël,
asphyxie la
population de Gaza. Les 450tonnes de farine nécessaires chaque
jour ne
parviennent plus, les réserves s'épuisent et des
pénuries de pain se
sont récemment produites. L'aggravation des conditions de vie,
ajoutée
au mépris dont font preuve les grandes puissances occidentales
à
l'égard de la population palestinienne, ont donné lieu
récemment à une
manifestation de colère, qui a regroupé deux mille
personnes à Gaza,
devant les bureaux des Nations unies.
La situation de la population palestinienne n'a
cessé de se
dégrader depuis les élections législatives
organisées en janvier
dernier, qui ont vu la victoire du parti islamiste du Hamas, ce que le
régime israélien a d'emblée
considéré comme un nouveau motif d'escalade
dans sa politique belliciste à l'égard des Palestiniens.
Les ultimatums
que le gouvernement d'Ehoud Olmert, soutenu par les États-Unis
et les
Européens, a immédiatement adressés aux nouveaux
dirigeants
palestiniens étaient une véritable provocation. Les
grandes puissances
exigent que ceux-ci reconnaissent Israël et respectent les accords
passés, sans dire un mot sur le fait que, pour sa part,
Israël a
toujours refusé la naissance d'un État palestinien. Au
contraire, il
fait tout pour que celui-ci ne puisse exister: il multiplie ses
colonies, annexe sans cesse de nouvelles terres. Oser aussi se
référer
à des "accords de paix" précédents est un
véritable non-sens puisque
tous ces accords de paix n'ont jusqu'à présent servi que
de paravent à
une politique dont la réalité est une accentuation de la
colonisation
en Cisjordanie et à Jérusalem.
Autre hypocrisie, celle qui consiste, de la part
d'Israël et
de ses alliés impérialistes, à exiger des
Palestiniens l'arrêt des
"violences", comme préalable à la reprise des
"relations", autrement
dit du versement des aides et des sommes confisquées. Certes, du
côté
des Palestiniens, il y a des tirs de roquettes artisanales, mais du
côté israélien, les actions militaires ont fait
autrement plus de
victimes. La dernière en date a fait quinze morts parmi les
Palestiniens, ainsi qu'une vingtaine de blessés.
D'impressionnants
moyens militaires sont mis en œuvre pour terroriser le million et demi
d'habitants de Gaza: tirs d'obus à partir de vedettes de marine,
envoi
de missiles, usage d'hélicoptères d'assaut, bombardements
prétendument
ciblés mais qui répandent la mort parmi les populations
environnantes.
Voilà la réalité que vivent nombre de
Palestiniens.
Mais cette complicité des dirigeants occidentaux
avec le
gouvernement israélien n'est pas chose nouvelle. Les puissances
impérialistes, les USA comme celles de l'Union
européenne, considèrent
depuis un demi-siècle Israël comme une base avancée,
chargée de
maintenir leur ordre au Moyen-Orient. Au détriment de la
population
palestinienne d'abord, mais aussi contre les intérêts de
la population
laborieuse israélienne, car chaque déni des droits
nationaux du peuple
palestinien ne fait que rendre plus difficile toute cohabitation
pacifique entre les deux peuples.
Viviane LAFONT, Lutte
Ouvrière, 14 avril 2006
|