L’inquiétude des communistes palestiniens

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Palestine : La victoire du Hamas accentue la pression sur les progressistes. À Tulkarem, le candidat communiste aux récentes législatives évoque même des menaces physiques.

Tulkarem (Cisjordanie), envoyé spécial.

À Tulkarem, le Hamas a fait carton plein : il a remporté les trois sièges. Un résultat qui doit beaucoup à la situation dramatique imposée par Israël à cette ville située sur la ligne verte (la frontière de 1967) et bouclée par l’armée israélienne depuis de longs mois. La vague verte a tout emporté, même les personnalités les plus connues et les plus actives de la ville. C’est le cas de Mohammad Bledy, candidat du Parti du peuple palestinien (PPP, communiste), engagé dans la lutte contre la construction du mur de séparation et en charge du PARC, une ONG consacrée à l’aide aux agriculteurs. Au lendemain de la victoire du mouvement islamiste, Mohammad a réuni quelques amis chez lui. Parmi eux, Samar, une forte femme qui explique : « Nous avons tous été surpris par le résultat. Nous pensions que les gens suivraient Mohammad qui est très connu et respecté par les gens. Mais les petites listes comme celles du PPP n’avaient pas assez d’argent. Le Hamas lui a dépensé sans compter. D’où vient cet argent ? » Elle est d’autant plus étonnée du résultat que « les candidats du Hamas n’étaient même pas de Tulkarem, personne ne les connaissait ». Toujours calme, Mohammad dénonce l’attitude des médias israéliens « qui n’ont pas arrêté de taper sur le Hamas. Les gens se sont dit que si ça gênait les Israéliens alors c’était le bon choix ». Mustafa, policier à Ramallah, mais originaire de Tulkarem, dénonce de son côté « ces gens du Fatah qui se croyaient tout permis et ont poussé les gens dans les bras du Hamas ». Hayat, une jeune femme, l’interrompt : « C’est le rêve du changement, seulement un rêve. »

L’épouse de Mohammad, Hanane, s’inquiète de cette victoire du Hamas, notamment pour le statut des femmes. « Depuis 1987 le Hamas bâtit des écoles, des hôpitaux et offre la gratuité en échange de l’adhésion au mouvement. Dans les ateliers pour les femmes, ils expliquent qu’il faut se marier jeune, se conformer en tout point aux préceptes du Coran. Leurs organisations reçoivent même des subventions des Américains à travers Usaid, qui font signer un document stipulant que ces fonds ne seront pas utilisés pour le terrorisme. Nous, nous avons toujours refusé de signer de tels papiers. » Mais Mohammad est inquiet. « Avec l’arrivée du Hamas on ne sait pas ce qui va se passer pour nous, gens de gauche, communistes. On peut être mis en prison, égorgés ou pendus. La gauche a besoin d’une nouvelle stratégie, et que la gauche dans le monde nous aide au lieu de soutenir le Fatah sans conditions. »

P. B, L'Humanité, 1 février 2006